KOTA

Les Kota forment un peuple bantou d'Afrique centrale, établi principalement au Gabon (région du fleuve d'Ogooué), mais également en République du Congo

Histoire

Les Bakota, peuple le plus important du nord-est, occupent actuellement au Gabon les régions suivantes : la route de Makokou à Mékambo; la route de Makokou vers le sud-est (route du Bouéni) sur la moitié de son trajet à partir de Makokou ; la route qui, de Mékambo, se dirige vers le nord, en direction de Madjingo ; sur la route de Lalara (au sud de Mitzic) à Boué, quelques villages; presque toute la partie du district de Lastoursville située au nord de l’Ogooué (le long d’anciens sentiers). On rencontre en outre quelques villages Bakota dans la région congolaise au nord-ouest d’Etoumhi et au sud-ouest d’Ouesso.
Ce sont là les Bakota proprement dits, et c’est le sens dans lequel nous prenons ce terme, tel qu’i1 est employé par les Bakota eux-mêmes. Mais il est fort commun de confondre sous le nom de Bakota tous les peuples du même groupe linguistique : Shaké, Shamaï, Ndasa, Danbomo, Bawoumbou. Mieux encore, dans les régions de Zanaga et de Mossendjo (République congolaise) on désigne sous le nom de Bakota non seulement tous les peuples de ce groupe, mais en outre ceux du groupe Mbamba-Ndoumou.

C’est ainsi que, par une aventure singulière, le volume d’Anderson, Les Bakota, étude ethnologique de ces régions (copieuse et excellente d’ailleurs) ne s’applique pas, en fait, aux véritables Bakota.

Origines : Les ancêtres occupaient le haut Ivindo, dans la région des rivières Singoué et Nona. Ils en furent chassés par l’invasion des Bakouélé, connue sous le nom de « Guerre de Poupou » . Descendant les rivières, ils arrivèrent à l’Ivindo et y trouvèrent les Bichiwa, avec qui ils firent amitié. Ils continuèrent à fuir le long de l’Ivindo, les Bichiwa devant, les Bakota derrière, toujours poursuivis par les Bakouélé, eux-mêmes poussés par les Fang. Ceci se passait « au temps du grand-père de leur grand-père, peutêtre même avant ». En route les Bakota se dispersèrent. Les uns (Benga) s’en allèrent vers l’ouest, jusqu’à la mer. D’autres (Kota-Kola) descendirent jusqu’à l’ogooué. La plupart passèrent l’Ivindo en radeaux.

En sûreté sur la rive gauche, ils fondèrent les villages de Seki et Botolouboumagna (la vieillesse de la pierre). Pou pou était mort, mais un autre guerrier, Mékomba, son égal en férocité, reprit la guerre. Les Bakota se dispersèrent à nouveau. Ils occupèrent ainsi les affluents de gauche de l’Ivindo : Djaddié, Liboumba, Mouniangui, la vallée de la Dilo et le pays d’Assawé (au nord de Lasloursville). D’autres continuèrent à descendre le long de l’Ivindo, toujours poursuivis par les Bakouélé. Arrivés à la chute de Kongwé, ils se retournèrent et engagèrent la lutte. Mékomba fut tué; beaucoup de Bakouélé furent pris et devinrent Bakota (on m’a montré certains de leurs descendants).
Alors les peuples se réconcilièrent, la paix a régné. A l’arrivée des Fang, il y eut un nouveau reflux des Bakota de Boué vers la Djaddié. D’autres sont restés isolés au milieu des Fang (région de La Lara). Les Bakola de Boué ont eu des démêlés avec les Shaké et les Bichiwa ; ils émigrèrent en partie vers Mékambo. Le long de l’Ivindo, ils n’ont pas trouvé de Pygmées (Bakola), mais ils les ont rencontrés près de la Djaddié, au sommet de la montagne Mbamba, d’où ils sont partis pour la région de Mékambo.

Culture

Techniques : La chasse se faisait surtout à l’aide de filets en fibre (liosi). On utilisait aussi des pièges à fibres végétales et des trous. Au-dessus du passage des éléphants on plaçait un fort tronc de bois armé d’une sagaie (elongo). On pêchait à la nasse (makanga), au barrage de pieux sur les chutes (ilambi), au barrage complet de la rivière par des claies (etoubili) avec agitation de l’eau en amont, à l’empoisonnement par des fruits amers.
La pêche tient encore une grande place dans ce pays aux rivières nombreuses; la saison sèche voit les vi lIages désertés pour les campements de pêche et les défrichements. Les cultures étaient les mêmes qu’aujourd’hui, mais on utilisait beaucoup les plantes de la brousse. Les forgerons tiraient le fer du sol (il y en a partout). On appelait berna un fer mêlé de cuivre dont on faisait des bracelets. Les forgerons Kota ont utilisé les premiers la montagne de fer de Boka-Boka (Mékambo). Les outils de culture étaient la hache, la matchette longue (kouala), la matchette courte (idoungou).
Les soumets de forge étaient en terre cuite. Les femmes fabriquaient des marmites et des gargoulettes. « Le premier pagne était la main, puis le bois, puis l’écorce» (tradition de Lastoursville). Ailleurs on se souvient des vêtements en écorce de nina : pagne (etesi) pour les hommes, deux carrés maintenus par une ceinture pour les femmes. Les pagnes de raphia ont été fabriqués plus tard par les rivernins des rivières.
Ensuite, quand le commerce s’est installé, on les remplaça par des pagnes d’écorce; les grands chefs y ajoutaient un veston. Aujourd’hui tout le monde (comme dans le reste du Gabon) est vêtu à l’européenne. Les maisons, petites, avaient des murs en écorce, des toits en feuilles. Les villages, comme ceux des Fang, comportaient deux rangées de maisons jointives avec, entre elles, une avenue coupée de corps de garde. Une barrière de bois formait rempart.

Société : Société Patrilinéaire et patrilocale. Le clan (ikaka, pluriel makaka), exogame, avait un chef (neni) choisi pour ses aptitudes.
Parfois un chef de village puissant jugeait les palabres entre clans. Les clans étaient nombreux. Certains s’étendaient à plusieurs peuples. Ainsi les Bousandou et les Mohaza existent à la fois chez les Bakota et les Mahongoué ; les Masaka chez les Bakota et les Bongom ; les Sakounda chez les Bongom et les Mahongoué ; les Isèkè bakota ont un clan correspondant chez les Fang. Les interdits de clans sont particulièrement nets et bien connus chez les peuples du nord-est.

En voici quelques-uns chez les Bakota : le clan Boungoualé a pour interdit le crocodile, le clan Mboungou : le buflle. Chez les Shamaï, proches parents des Bakota, le clan Bouala ne mangeait pas de gorilles, ses morts se transformant en gorilles.

Il n’y avait pas d’esclaves proprement dits, mais un système de clientèle et d’annexion familiale. Le jeune amant de la femme d’un riche polygame devenait son fils. Un orphelin pauvre pouvait aussi se mettre sous sa protection. Si un jeune homme se montrait constamment pervers, il était jugé par les gens du clan et exécuté.

Religion : On gardait certains os des grands personnages (crâne, vertèbres du bassin, mâchoire inférieure) dans une corbeille d’écorce cylindrique. Ces reliques, appelées pembè, étaient placées dans la case du chef de clan ou du chef de famille. Les plus importantes étaient surmontées d’un masque de bois recouvert de cuivre. Il existait aussi des masques pour danser, sans cuivre.

La forme, concave ou convexe, « dépendait de la fabrication» et n’indiquait pas le sexe. On invoquait les pembè dans différenLes circonstances, notamment pour la chasse: un poulet était sacrifié, de la poudre rouge passée sur le crâne ; un repas était offert aux ancêtres, à base de poulet et de bananes. Des missionnaires ont condamné ces rites; puis est venu (vers 1957) le « culte de Mademoiselle» qui a fait détruire tous les ossements et les masques. « Depuis nous sommes devenus pauvres».
La circoncision avait lieu remarquablement tard, après 25 et même parfois 40 ans. Elle consacrait l’état d’adulte véritable, travaillant et ayant femme et enfants. Aujourd’hui l’opération est pratiquée beaucoup plus tôt, vers la puberté. La cérémonie est individuelle; l’assistance est convoquée par le père de famille. La réunion a lieu au lever du soleil. Le patient a mâché des herbes qui lui donnent le courage et l’insensibilité nécessaires ; on le frotte d’huiles mélangées de poisson, son visage est blanchi. Désormais « il n’est plus sale », il est vraiment un homme.